Regard d'expert : comment se joue la course aux brevets de la 5G
La 5G est annoncée pour 2020 mais l’activité inventive est en marche depuis 2012 avec la Chine, les États-Unis et la Corée du Sud qui ont pris le meilleur départ dans la course aux brevets. Cette situation présente-t-elle un inconvénient pour l’Europe dans la compétition ouverte pour imposer le futur standard? Fondateur d'IEBREVET à Sophia Antipolis, Lionel Fuster jette un regard sur cette phase préparatoire à l'arrivée de la 5G. Voici son regard d'expert.
Alors que la 4G n'est pas encore totalement déployée, la 5G, avec un potentiel prévisible bien supérieur favorable à de nouveaux usages pour le grand public comme pour les organisations, est déjà très commentée, à propos notamment du développement de l’Internet des objets. Les "Infrastructures de 5ème Génération" correspondent à une "Technologies clés 2020" et l’enjeu de la standardisation est considéré comme "hautement stratégique".
A Sophia Antipolis, l’équipe IEBREVET, spécialisée dans la recherche et l’optimisation de l’information brevets, est habituellement mobilisée sur des technologies émergentes ou des thèmes d’actualité avec pour mission d’identifier précisément les acteurs, de déterminer les territoires de l’innovation et d’établir des liens stratégiques.
Lionel Fuster, le dirigeant, et Daniel Vinsonneau, Directeur associé, ont mis en évidence une activité inventive en relation avec la 5G perceptible depuis 2012, année de l’apparition des premières publications sur le sujet. Supposant des résultats de R&D obtenus dès 2010, certains acteurs n’ont pas tardé à entrer dans la compétition. Espèrent-ils influer sur le choix du futur standard et la définition des spécifications techniques ?
Près de 6.000 inventions en relation avec la 5G
Selon une première méthode de recherche des documents, près de 6.000 inventions (familles de brevets) ont pour objet la 5G ou présentent un lien avec des "systèmes" pré 5G, 5G ou IMT-2020 (projet de l’Union internationale des télécommunications, UIT). Moins de 10 inventions sont publiées en 2012, rapidement complétées (250 en 2013) et plus que doublées ensuite chaque année (500 en 2014, 1.000 en 2015, 2.500 en 2016).
La tendance de progression, il est vrai moins prononcée, semble se maintenir avec 1.300 publications pour les 4 premiers mois de 2017. L’analyse de ces résultats révèle une domination de la Chine (plus de 2.000 inventions), des Etats-Unis (1.500) et de la Corée du Sud (plus de 1.000). Un regroupement européen aboutit à un nombre cumulé de près de 800 inventions avec une bien plus forte concentration de l’activité (3 principaux acteurs industriels seulement).
Représentant la Corée du Sud, Samsung Electronics fonde une véritable stratégie de protection claire et massive de son innovation autour des réseaux mobiles de cinquième génération. Suivent dans le classement réalisé des déposants, Verizon, Huawei Technologies, Ericsson, Qualcomm, Nokia Networks, Intel, LG Electronics, ZTE,... Le lien établi avec le sujet est cependant très inégal (fort pour Samsung Electronics et beaucoup moins pour d’autres), montrant des avancées techniques, des motivations et des stratégies industrielles très différentes, certainement à interpréter.
Nombre d’inventions observées par le cabinet IEBREVET dans l’étape initiale de son étude font bien référence à l’internet des objets et proposent des produits ou procédés pour les futures villes ou maisons intelligentes, des services intelligents, les véhicules connectés. L’économie d’énergie dans les nouveaux réseaux représente également un important thème de recherche. Les documents sélectionnés permettent de découvrir les fréquences radio proposées par les inventeurs, les architectures ou techniques mises en oeuvre (MIMO, OFDM,...), des antennes, des routeurs,... offrant un moyen unique d’apprécier le positionnement initial des uns et des autres.
S’agissant des stratégies de grands groupes internationaux, Google et Facebook, par exemple, ont pris soin d’intégrer la 5G à des systèmes ou procédés de téléchargement, de streaming ou de détection d’erreurs. Dans la période qui précède l’apparition de nouveaux produits, il est habituel que des équipes de recherche, indépendantes ou non, avancent provisoirement dans la discrétion. Les études IEBREVET sont l’occasion d’investigations approfondies consistant à identifier précocement les structures peu visibles qui méritent cependant la plus grande attention dans un contexte concurrentiel.
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