Tourisme : le Yachting Côte d'Azur menacé de naufrage ?
Face à l'application de nouveaux textes et à la réactivation d'anciennes règles dans les domaines douaniers, fiscaux, sociaux, environnementaux, les armateurs de yachts quittent la Côte d'Azur vers d'autres territoires européens. D'où le cri d'alarme d'ECPY, le comité européen des professionnels du yachting qui, basé à Nice, demande à ce que les règles fiscales, sociales et environnementales soient harmonisées avec nos voisins européens.
La Côte d'Azur est-elle en train de perdre un de ses plus beaux atouts en matière de tourisme : la grande plaisance? Alors que la France et la Côte d'Azur, marquées par le dramatique attentat de Nice du 14 juillet 2016, sont à la recherche de plans de relance pour leur tourisme, les professionnels du yachting, tirent la sonnette d'alarme. Regroupés dans le comité européen des professionnels du yachting (ECPY dont le siège est au Port de Nice), ils dénoncent la situation absurde à laquelle est confrontée l’industrie du yachting sur la Côte d’Azur dans un communiqué au titre incisif : "Yachting Côte d’Azur : Chronique d’un sabordage économique"
Une concurrence déloyale à l'intérieur même de la Communauté Européenne
"L’application de nouveaux textes français et la réactivation d’anciens textes dans les domaines douaniers, fiscaux, sociaux, environnementaux sur le territoire français entravent l’économie du yachting et conduisent les armateurs de yachts à quitter la Côte d’Azur au profit d’autres territoires européens où la législation est plus claire et moins contraignante", écrivent-ils.
Et d'expliquer. "Une concurrence déloyale s’est ainsi creusée dans le marché du yachting à l’intérieur même de la Communauté Européenne qui a pourtant pour mission l’harmonisation des textes pour éviter toute distorsion : les Italiens, les Espagnols, les Croates, les Maltais et même les Grecs appliquent des textes plus favorables que les textes restrictifs français alors que l’ensemble est dicté par les mêmes exigences de la Commission européenne."
Le résultat s'est déjà fait largement sentir : les yachts quittent les eaux françaises pour hiverner hors des eaux territoriales nationales. Un mouvement qui s’accentue. "La France a déjà connu une situation analogue en 1982-1983 provoquant l’exode des yachts, une crise de l’économie locale, des destructions d’emplois et la chute des rentrées fiscales", rappelle l'association. A l'époque, le gouvernement socialiste était revenu en arrière ce qui avait permis de sauver la situation.
Tous les "marqueurs" au rouge
Une situation qui aujourd'hui est de nouveau très préoccupante. Tous les "marqueurs" sont au rouge dans les domaines suivants note ECPY :
Fiscalité :
- Fin de l’exonération de TVA pour les yachts au commerce ne naviguant pas en haute mer. Dispositif appliqué uniquement en France.
- Prélèvement à la source de 33% réclamé aux professionnels sur les fonds de leurs clients transitant par leurs comptes. Dispositif appliqué uniquement en France.
Social :
- Application de réglementation sociale française aux personnels embarqués sur des navires étrangers. Dispositif appliqué uniquement en France.
Douanier :
- Taxation brutale des produits pétroliers
- Fin de l’exonération de la TVA sur la valeur de tous les yachts enregistrés au commerce. Dispositif appliqué uniquement en France.
Environnemental :
- Augmentation des interdictions de mouillage et des zones soumises à pilotage. Dispositif appliqué uniquement en France.
Et d’une façon générale recherche effrénée de fiscalisation des activités du yachting alors que le principe de défiscalisation des navires internationaux (cargos, navires de croisière …) est reconnue dans le monde entier.
Ce que demande ECPY
Face à cette situation, la demande du Comité Européen pour le Yachting Professionnel, vise à effacer la distorsion de concurrence qui s'est instaurée au sein des pays de la Communauté européenne. ECPY demande que les règles fiscales, sociales et environnementales soient harmonisées avec nos voisins européens.
Que la commission européenne cesse la pression qu’elle exerce sur la France (et non sur les autres pays européens), dont le résultat est de creuser des distorsions concurrentielles qui à terme ne pourront être que fatales au secteur du yachting en France.
Que les élus et responsables politiques locaux, régionaux et nationaux se saisissent de ce dossier pour défendre l’économie du yachting en France.
"L’industrie du yachting sur la Côte d’Azur s’est constituée avec les règles de marché. La France a hérité d’un réseau portuaire inégalé dans le monde qui a été financé par les armateurs de yachts. Il serait regrettable/criminel de provoquer l’effondrement de cette économie à fortes retombées sociales", conclut ECPY.
Le poids économique du yachting professionnelLa Méditerranée, avec tout particulièrement la Côte d'Azur pour son remarquable écosystème touristique, est avec la Floride la première destination mondiale pour la grande plaisance. Une chance et un formidable atout pour l'économie du territoire. Le secteur du Yachting est ainsi le second exportateur des Alpes-Maritimes. Au total sont comptabilisés 2.343 Etablissements pour 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 5.300 emplois directs (ref. observatoire portuaire 2016). Exemple de la "haute valeur ajoutée" de cette grande plaisance : un yacht de 55m représente plus de 4 M€ de dépenses annuelles effectuées dans le territoire dans lequel il séjourne. La moyenne des dépenses par yacht toutes tailles confondues est de 1.3 M€ par an. Le yachting professionnel "est un puissant moyen de redistribution de la richesse vers les métiers relevant du domaine maritime mais aussi de ceux du tourisme en général : marins, personnel hôtelier, artisans, chantiers navals, commerces locaux…", rappelle aussi ECPY qui espère que son cri d'alarme sera entendu à temps. |