Attentat de Nice : la polémique sur la sécurité prend de l'ampleur
"Contrairement à ce qu’a affirmé le ministère de l’Intérieur, l’entrée du périmètre piéton de la promenade des Anglais n’était pas protégée par la police nationale le 14 juillet au soir", affirme "Libération", dans une enquête publiée hier. Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, qui a immédiatement réfuté les arguments du quotidien, a annoncé ce matin qu'il allait demander à la "police des polices" (l'inspection générale), une évaluation technique du dispositif de sécurité mis en place sur la promenade des Anglais à Nice le 14 juillet pour "établir la réalité de ce dispositif".
Comment le "camion fou" a-t-il pu pénétrer sur une promenade "sécurisée" et fermée à toute circulation ? Une semaine après le dramatique attentat du 14 juillet à Nice, la polémique sur le dispositif de sécurité mis en place pour le feu d'artifice prend de l'ampleur. Elle était apparue déjà au lendemain de cet assassinat de masse. Président de la Région PACA et ex-maire de Nice, Christian Estrosi avait posé immédiatement la question qui était dans toutes les têtes : "J’aimerais comprendre comment ce camion a pu rentrer dans la zone piétonne ?" s’était-il interrogé, mettant en cause du même coup le gouvernement responsable de la sécurité publique.
Bernard Cazeneuve va demander une inspection de la Police des Polices
Mais hier, mercredi, la polémique a pris une nouvelle ampleur suite à la publication d'une enquête de Libération et aux déclarations du président départemental de la Fédération des Transports Routiers qui se demande pourquoi, lors de ses repérages le 12 et le 13 juillet, le camion est passé inaperçu alors que même en dehors de festivités, la Prom' est interdite à tout camion hors dérogation spécifique comme pour un déménagement.
Quant au dernier rebondissement en date, il est intervenu ce matin : Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, va demander à la "police des polices" (l'inspection générale), une évaluation technique du dispositif de sécurité mis en place sur la promenade des Anglais à Nice le 14 juillet. Ce qu'avaient par ailleurs déjà demandé plusieurs élus dont Christian Estrosi. "Cette enquête administrative, sans préjudice de l'enquête judiciaire en cours, permettra d'établir la réalité de ce dispositif, alors que des polémiques inutiles se poursuivent", précise le ministère de l'Intérieur.
L'enquête de "Libé" pointe "des failles de sécurité et un mensonge"
L'enquête du quotidien "Libération" parue hier mercredi, semble en tout cas donner raison aux premières interrogations du président de la Métropole Nice Côte d'Azur. Dans l'article intitulé "Attentat de Nice : des failles de sécurité et un mensonge", le quotidien dit on ne peut plus clairement que "contrairement à ce qu’a affirmé le ministère de l’Intérieur, l’entrée du périmètre piéton de la promenade des Anglais n’était pas protégée par la police nationale le 14 juillet au soir. Ce manque de transparence entame la confiance dans l’exécutif."
Et de noter, témoignages et photos à l'appui, que la police nationale ne se trouvait pas au premier point d'entrée sur une Promenade "piétonnisée" pour le feu d'artifice, "à l’angle du boulevard Gambetta, à une dizaine de mètres du High Club.(…/..) Seuls deux agents de la police municipale sont alors placés au milieu de la chaussée." Les policiers nationaux ont été relevés aux alentours de 20h30 par leurs collègues municipaux (21 heures, précise un communiqué du ministre de l'Intérieur), tandis que la voiture de la police municipale, garée en long sur le bas-côté ne barre pas physiquement le passage.
Des arguments réfutés par le ministère de l'Intérieur
Et le quotidien de bien enfoncer le clou : "en clair, le dispositif constaté est exactement celui qui avait été prévu. Mais pas du tout celui décrit a posteriori par la Place Beauvau et la préfecture. Puisque ces derniers assuraient qu’il y avait une présence de la police nationale à l’entrée de la zone piétonne." Mais est-ce qu’un dispositif de sécurité renforcé aurait changé les choses ? Personne évidemment ne peut répondre à cette question. Mais l'armement des policiers municipaux (revolver de type 38 spécial, un six coups de calibre 7,65 millimètres) ne permet pas de crever les pneus ni de percer le parebrise d'un gros camion, tandis que postés plus loin, à la hauteur de l'Hôtel Westminster, les policiers nationaux, eux, armés de Sig-Sauer 9mm, peuvent agir beaucoup plus efficacement. Ce qui aurait peut-être permis d'arrêter le camion plus tôt et de sauver des vies. Autant d'éléments apportés par Libé qui ont été vivement réfutés dans un communiqué du ministère de l'Intérieur, et qui ont été qualifiés de "contre-vérités" par Bernard Cazeneuve.
Autre interrogation qui s'est faite jour : comment l'assassin a pu, sans être contrôlé ni susciter la moindre alerte, effectuer des repérages les 12 et 13 juillet avec le camion de 19 tonnes, alors que la Prom' est interdite aux poids-lourds, même en temps ordinaire, comme l'a fait remarquer Patrick Mortiglielgo, président 06 de la Fédération Nationale des transports Routiers. Autant de questions qui attendent des réponses plus précises une semaine après que l'impensable, un attentat de cette ampleur, ait eu lieu à Nice, l'une villes de France à priori les mieux sécurisées.
- Lire dans Libération : "Attentat de Nice : des failles de sécurité et un mensonge"