Gérard Rodriguez : plaidoyer pour la grande plaisance
'Rien n'a bougé en France. La grande plaisance n'est toujours pas reconnue. Et pourtant sur la Côte d'Azur, elle fait travailler de 16 à 20.000 personnes…'
Président du Festival international de la Plaisance, Gérard Rodriguez aura réussi son pari : donner encore plus d'ampleur à une manifestation qui en est à sa 22ème édition. Non seulement elle gagne une journée : du mercredi 8 au lundi 13 septembre, soit six jours au lieu de cinq auparavant. Mais elle s'est aussi étendue encore un peu plus dans le vieux port de Cannes avec 1.200 mètres de linéaire, d'un seul tenant du quai Laubeuf au bout du quai Albert Edouard en passant par la Pantiero; 350 marques et 500 bateaux présentés à flot et à quai.Gérard Rodriguez, outre ses fonctions de président du salon nautique, est devenu également le grand professionnel du nautisme azuréen. Avec la SNP Rodriguez, côtée en bourse depuis 1998, il devrait réaliser cette année 450 millions de francs de chiffre d'affaires sur le créneau des yachts de grande plaisance. Un secteur qu'il connaît donc parfaitement bien et qu'il défend bec et ongles.Vous n'avez pas été tendre avec les pouvoirs publics. Dans chacune de vos déclarations, vous les égratignez en leur reprochant de ne rien faire pour le statut de la grande plaisance. Gérard Rodriguez :'Rien n'a bougé. La grande plaisance n'est toujours pas reconnue. En France, un bateau de plus de 24 mètres n'a pas le droit à un drapeau de plaisance comme dans les autres pays. Il est toujours considéré comme un bateau de commerce. Personne ne s'est penché sur la grande plaisance. Or, sur la Côte d'Azur elle fait travailler de 16 à 20.000 personnes.De plus, c'est un secteur qui connaît aujourd'hui un boom fantastique. Imaginez qu'il se construit chaque année en Europe de 200 à 300 bateaux de plus de 24 mètres chaque année. Et que cette production annuelle représente 800 à 1.000 emplois de plus pour l'entretien, les services, les équipages. C'est là une formidable opportunité pour la Côte d'Azur qui est la première destination européenne pour la grande plaisance. Mais si nous ne faisons rien, ces bateaux partiront ailleurs. En Italie, en Espagne ou même en Tunisie. Le président de la République tunisienne a déjà proposé de mettre à ma disposition un chantier naval pour que je m'installe en Tunisie !La Côte d'Azur n'a même pas d'école de la grande plaisance où seraient formés les capitaines. Il faut aussi qu'elle se penche sur l'aménagement de ses ports. Si on ne peut plus faire de nouveaux ports, au moins qu'on réaménage les bassins existants qui, pour beaucoup, ont plus de trente ans d'âge. Ils correspondaient à une époque ou les bateaux étaient plus petits. Or, maintenant les bateaux ont gagné en taille et les ports ne répondent plus à cette nouvelle demande. Les pouvoirs publics doivent donc prendre conscience de tous ces problèmes qui, avec la reprise que nous connaissons deviennent de plus en plus urgents à résoudre.'Avec votre société, vous avez inventé un nouveau métier dans la plaisance. Comment définiriez-vous ce métier? Gérard Rodriguez :'Ce qui me semble le plus juste, c'est de dire que je suis un promoteur de la plaisance. J'achète des productions complètes à des chantiers et je les revends. La société a ses architectes, ses décorateurs et chaque bateau est personnalisé. Je dispose de l'exclusivité de deux chantiers italiens (Arno et Overmarine) à Viareggio. La nouveauté, tient dans un troisième chantier qui est espagnol : Astondoa à Alicante est le plus grand chantier espagnol de la plaisance. Il travaille avec moi en exclusivité mondiale (sauf pour l'Espagne).Cela me permettra d'accroître mon activité pour l'an prochain et de construire de 28 à 30 bateaux de plus de 22 mètres en 2000 (dont 8 à 10 bateaux par le chantier espagnol). Le chiffre d'affaires de la SNP Rodriguez, qui était de 350 millions de francs en 1998, devrait atteindre 550 millions en 2000. Quant à ma clientèle, elle est française à 30%, allemande à 20%, suisse, italienne, moyen-orientale (8%).'La plaisance en général connaît-elle la même expansion ? Gérard Rodriguez :'Toute la plaisance bénéficie de la reprise. Il n'y a qu'à regarder Bénéteau dont le chiffre d'affaires a progressé de 60% et donc l'action, qui tournait autour de 90 euros en 1998, est montée à 200 euros. Le salon de Cannes, déjà l'an dernier, avait vu le volume des ventes réalisées progresser de 30%. Il devrait cette année bénéficier encore plus de ce nouvel élan.'