Les Irlandais disent non au Traité de Nice
L'Europe Unie prise à contre-pied vendredi soir : les Irlandais, par référendum, se sont prononcés contre la ratification d'un traité qui nécessite l'unanimité des Quinze.
Le Traité de Nice, si durement conclu en décembre dernier, sera-t-il remis en cause ? L'élargissement de l'Europe, que prépare ce traité historique, est-il compromis ? C'est ce que l'on pouvait craindre, vendredi soir, alors que le résultat d'un référendum organisé en Irlande se révélait très net : l'Irlande, par 54% des votants contre 46%, se prononçait clairement contre la ratification du Traité. Or, pour que le Traité de Nice puisse entrer en vigueur, il est nécessaire que l'ensemble des 15 pays de l'Union Européenne le ratifie avant la fin 2002.Comme le Danemark pour MaastrichtLe résultat de ce référendum (l'Irlande est le seul pays de l'Union qui ait à décider de la ratification par référendum) a aussi plongé hier soir l'Union Européenne dans un grand embarras. D'autant plus qu'un vote dans ce sens n'était pas prévu. Rien n'est pourtant perdu. Le même problème s'était posé en 1992 à propos du Danemark lors de l'adoption du traité de Maastricht. Les Danois avaient alors obtenu une "décision" du Conseil européen permettant de "clarifier" certains points du Traité et offrant la possibilité d'exercer de façon anticipée des clauses d'exemption. Une second référendum avait alors été engagé et avait permis de rallier le Danemark à Maastricht en mai 1993.Il semble que pour l'Irlande, l'E.U. s'achemine vers la même solution. D'autant plus que le vote des Irlandais n'a pas été interprété comme un rejet de l'Europe. Les arguments qui ont pesé en faveur du non étaient la peur de céder davantage de souveraineté à Bruxelles, l'harmonisation fiscale (Dublin qui bénéficie d'une faible fiscalité n'y est évidemment guère favorable) et surtout la mise en place d'une force européenne qui sortirait l'Irlande de sa traditionnelle neutralité. Ce dernier point est particulièrement sensible alors que Dublin s'est engagé à fournir un millier d'homme à la future force européenne.Rédiger un "protocole" additionnelDublin, dès hier soir, a d'ailleurs déclaré qu'il ne souhaitait pas une renégociation du Traité mais qu'il était favorable à la solution d'un second référendum. Le gouvernement irlandais a ainsi fait savoir qu'il était prêt à organiser ce nouveau référendum s'il obtenait quelques "clarifications". Selon certaines sources, pour obtenir le soutien des électeurs, il pourrait suffire d'un paragraphe indiquant que la participation de soldats irlandais à une force européenne commune doit être préalablement approuvée par le Parlement.En fonction de l'analyse que les autorités de Dublin tireront du scrutin, il serait possible de rédiger un "protocole" additionnel au Traité de Nice pour prendre en compte les craintes exprimées par les électeurs. Ce "protocole" aurait alors à être approuvé par les chefs d'Etat et de gouvernement européens réunis en sommet ordinaire ou extraordinaire, puis serait joint au traité actuel. Une péripétie nouvelle pour un Traité de Nice qui, décidément, ne s'élabore que dans la douleur…