Coronavirus et fake news : la nécessaire mobilisation des journalistes professionnels
Le Club de la Presse Méditerranée 06, qui regroupe 80 journalistes appelle à la lutte contre les fausses nouvelles. Son président Paul Barelli, ex correspondant du quotidien Le Monde, invite à une collaboration entre les journalistes des différents médias pour enrayer le déferlement de fausses informations médicales. Voici son texte qui commence et finit par une formule volontairement provocatoire : "Mort aux cons"!
« Mort aux cons ! » avait écrit sur sa Jeep le capitaine Raymond Dronne de la 2e DB qui fut la première à entrer dans Paris, le 24 août 1944. Au sujet de l’inscription, le Général De Gaulle aurait déclaré : « Vaste programme ».Ces propos sont réactualisés par le déferlement de fake news sur le coronavirus.
Freiner cette « infodémie », terme de l’OMS, « vaste programme », c’est lutter d’abord contre la bêtise qui triomphe sur les réseaux sociaux. Cela implique un engagement sans faille des journalistes professionnels. Et de tous ceux qui résistent au complotisme. Enrayer le déferlement des fausses nouvelles médicales. Tel est l’objet du « CoronaCheck » d’Eurecom à Sophia Antipolis.
La grande école du numérique, révèle Webtimemedias.com, est un acteur clé de l’Intelligence artificielle. Elle vient de mettre en place le premier système de vérification des faits pour les déclarations statistiques sur les coronavirus (ce travail est rendu public aujourd’hui avec la publication de CoronaCheck (https://coronacheck.eurecom.fr/).
Les journalistes professionnels (ce n’est pas un mot grossier !) s’efforcent de s’adapter à l’effarante révolution numérique. Depuis le début de la contagion, la presse traditionnelle réagit avec force contre les fake news médicales qui peuvent tuer, à leur manière. La plupart des rédactions, les chaînes d’information continue, la presse écrite, les radios, France Inter, RTL, Europe 1, luttent contre les « infox » avec virulence. Le complotisme prospère en France. Le mal s’est amplifié de manière exponentielle depuis le 11 septembre.
Le coronavirus est peut-être une opportunité à saisir pour les journalistes professionnels. Poursuivre une lutte sans merci contre les fausses nouvelles. Devenir des vigies sur la toile. Se distinguer par un renforcement de la fiabilité des informations dans chaque rédaction, exercer un droit de vigilance médiatique, dénoncer toutes les dérives.
Réhabiliter la profession de journaliste ?
La question se pose désormais avec acuité de savoir s’il n’est pas opportun de tenter de réhabiliter notre profession. Le chantier est colossal, pourtant des initiatives nouvelles émergent : de la rencontre avec le public en passant par des projets de régulation des réseaux sociaux. Certes, de nombreux médias cèdent toujours aux sirènes de l’émotionnel. Cependant, la plupart des médias traditionnels ont tiré les leçons des dérives relatives à la couverture des attentats de 2015.
Les médias en ont-ils trop fait sur le Covid-19 ? « Non ! », a répondu sur Europe 1 Hervé Béroud. Le directeur général délégué d’Altice Média, qui chapeaute notamment les chaînes du groupe BFM et RMC, a estimé qu’en cette période de crise les journalistes avaient une mission « d’utilité publique » à remplir en continuant d’informer les Français confinés.
Les journalistes professionnels qui ont pâti de leur individualisme peuvent puiser de la force en se regroupant afin de faire face aux fausses nouvelles. L’heure est venue d’instaurer une plus grande solidarité entre les rédactions. Les syndicats, les Clubs de la presse ont leur rôle à jouer.
Il se révèle impérieux de renforcer l’éducation aux médias. Cela passe par une pédagogie, dès l’école, sur la profession de journaliste. Nos détracteurs ignorent ce qu’est notre métier. Pour autant, les journalistes professionnels ne doivent pas se réfugier dans un corporatisme de repli mais pratiquer l’autocritique.
Le succès des émissions telles que « Les auditeurs ont la parole » atteste d’un sentiment contradictoire de répulsion/fascination à l’égard des médias. Preuve que la bataille pour redonner confiance au public dans sa perception de l’information n’est pas perdue.
Le chemin est escarpé mais il s’inscrit dans la perspective de préserver la liberté d’expression._
Morts aux cons !
Paul Barelli, Président du Club de la Presse Méditerranée 06