Monaco : l’analyse et les prévisions du Chef-économiste de Coface
“On va passer d’un monde globalisé à croissance forte avec une énergie bon marché et de l’argent facilement accessible à un monde plus volatile et qui se fragmente, avec une croissance qui, bien que plus faible, sera toujours présente” : c’est ainsi que Jean-Christophe Caffet, Chef-économiste de Coface, invité par le MEB (Monaco Economic Board) résume la nouvelle tendance de l’économie mondiale.
Comment se porte l’économie mondiale ? Qu’attendre de 2024 ? Ce sont des questions auxquelles a répondu Jean-Christophe Caffet, le Chef-économiste de Coface, à l’occasion d’un petit-déjeuner conférence organisé en fin de semaine dernière par le Monaco Economic Board, en collaboration avec Gramaglia Assurances et la Banque Populaire Méditerranée. Une conférence qui, comme l’a rappelé le président du MEB, Michel Dotta, se tenait peu après le célèbre Colloque Risque Pays Coface de Paris et pouvait bénéficier du maximum d’infos. (Photo MEB / Sébastien Darrasse : Jean-Christophe Caffet).
Le ralentissement de l’inflation en 2023 ?
Jean-Christophe Caffet l’a expliqué principalement par la baisse des matières premières : choc énergétique en partie résorbé, bonnes récoltes agricoles (à l’exception notable du riz) ou encore reprise décevante en Chine. “Un phénomène essentiellement mécanique donc, les banques centrales ne sont en rien responsables de ce phénomène contrairement à ce que l’on entend beaucoup (...) on leur prête bien trop de pouvoir !”
La croissance mondiale supérieure aux attentes ?
L’année s’est terminée sur une croissance mondiale de 2,6%, soit un demi point de plus qu'attendu. Les causes ? Essentiellement l'interventionnisme des États (mesures liées au Covid et boucliers anti-inflation) et la résilience permise par les excès d'épargne des ménages, et de trésorerie des entreprises, “ce qui a permis d’absorber le choc de la crise ukrainienne”.
Le passage d’un risque énergétique à un risque financier
Concernant le court-terme, le titre de la présentation de Jean-Christophe Caffet, "D’un risque à l’autre", était révélateur de la situation actuelle. “On est en effet passé d’un risque essentiellement énergétique l’an dernier à un risque qui est aujourd’hui principalement financier”. Et d’ajouter, “c’est paradoxalement plus rassurant car c’est quelque chose que l’on connaît mieux”.
Les conditions de financement resteront compliquées
Malgré un resserrement des taux, il n’est pas prévu de retrouver les conditions pre-covid. “On est revenu à des taux de l’ordre de l’avant crise de 2008, mais avec des niveaux d’endettement public et privé qui ont considérablement augmenté.” Conséquence : les conditions de financement resteront compliquées pour nombre d'entreprises qui connaissent de plus en plus de défaillances.
Une croissance 2024 essentiellement due aux pays émergents
Pour 2024, la croissance mondiale devrait être de l’ordre de 2,2%, essentiellement due aux pays émergents, l’Europe poursuivant sur son rythme “mou” et les Etats-Unis, qui avaient surperformé, devraient ralentir (de 2,4% en 2023 à 1,2% en 2024). Malgré cela, Coface a relevé sa notation Risque Pays de 12 pays dont 6 en Europe, l’Italie qui avait été déclassée en 2022 devrait être reclassée de “B” en “A3” en juin. Côté déclassement, seule la note d’Israël a été abaissée pour des raisons évidentes. Sur son autre classement qui s’intéresse aux secteurs d’activités au niveau mondial, Coface a relevé la note de dix-sept secteurs et en a abaissé cinq, traduction d’un optimisme prudent qui fait suite aux chocs des crises récentes.
Les tendances long terme
Enfin pour le plus long terme, Jean-Christophe Caffet voit dans la situation actuelle et à venir la fin d’un cycle de croissance forte et de faible inflation. Plusieurs défis de taille se présentent, à commencer par la transition énergétique “qui va coûter très cher dans un environnement de taux plus élevé”. Autre tendance, la modification des délocalisations des unités de production vers des pays “amis”, le “friendshoring”, ou la duplication des unités pour diminuer les risques (politique de Chine + 1 qui ajoute un autre pays à la Chine en cas de problème). Enfin le vieillissement des populations, en particulier dans les pays développés, qui pèsera sur les finances.