Sophia : le grand vent de la Silicon Valley
Quelques premières success stories (Echo, Odisei, SIP) avaient ouvert le ban. Mais depuis trois mois, c'est une véritable effervescence, avec l'émergence d'une vingtaine de start-ups…
Une irruption quasi volcanique dans le paysage économique de la Côte d'Azur! Un véritable phénomène, très récent, dont toute la mesure n'a pas encore été vraiment prise. Car depuis le milieu de l'été, le vent de la Silicon Valley et du nouvel entreprenariat, souffle fort sur Sophia Antipolis et la Côte. En trois mois, le nombre de start-ups a pratiquement doublé. Avec, à la clé, quelques nouvelles success stories et surtout de fantastiques perspectives si l'on considère la qualité des projets et le professionnalisme des équipes qui les mènent.Les premières success storiesA la fin du mois d'août dernier, à l'occasion d'un dossier 'start-ups' que la CCI réalisait pour Azur Economie, une de ses publications encartée dans le quotidien régional Nice-Matin, la DPCT (Direction des Pôles de Compétences Technologiques) avait établi un recensement. Sur le critère d'une entreprise à fort potentiel de croissance, ayant pour objectif la prise d'une part de marché mondial, il n'y avait guère qu'une vingtaine de sociétés qui répondaient à ce profil pointu.On y trouvait les 'success stories' de ces dix-huit derniers mois : Echo, le moteur de recherche dans lequel était entré France Telecom en avril 1998 et avec lequel avait été bâti 'Voilà'; Odisei(téléphonie sur IP) qui venait d'être racheté par l'Américain 8X8 pour 70 millions de francs; SIP, premier éditeur français de logiciels bancaires, acquis pour 60 millions de francs par ACT, filiale du géant britannique Mysis; Dust SAsur la restauration de films anciens par procédé numérique qui avait emporté haut la main à Paris, le prix Tremplin du Sénat, sur les entreprises de croissance; Realviz, qui venait de réussir trois tours de table successifs et avait levé 25 millions de francs pour développer des logiciels mettant les effets spéciaux du cinéma à la portée du simple vidéaste.Le coup d'éclat d'AuclandDerrière quelques entreprises poussaient (certaines d'ailleurs allaient faire parler d'elles rapidement). Auclandde Fabrice Grinda, sur le modèle américain d'E-bay, s'était lancé sur le marché prometteur des enchères sur Internet. La jeune société (à peine six mois) réussissait un coup d'éclat en septembre : Europe@web, le fond d'investissement du groupe Arnault, rachetait 50,1% des parts pour 115 millions de francs. Jamais un investissement aussi massif n'avait été fait jusqu'alors dans une start-up française qui se trouvait valorisée à 230 millions de francs!Metrix, société luxembourgeoise devenue française lors de son implantation à Sophia Antipolis en 1997, lançait des plans de croissance fulgurants à partir de ses logiciels spécialisés dans l'administration de réseaux sous Windows et Unix (type Win Watch). De 2 millions de dollars de chiffre d'affaires en 1998, elle visait les 45 millions de dollars en 2001 et s'en donnait les moyens. Parmi ceux qui pointaient il y a trois mois et allaient concrétiser entretemps : Nicox, sur le créneau des biotechnologies redonnait du souffle à des médicaments déjà connus, grâce à l'adjonction d'oxyde nitrique, technique validée par un prix Nobel de médecine. En novembre, Nicox était introduit sur le Nouveau Marché et levait près de 200 millions de francs.Respublica, lancée par Christophe Dupont, qui avait déjà été à l'origine de l'aventure d'Echo, engrangeait les internautes 'communautaires'. Sa stratégie, c'était de prendre des parts de marché. La société réussissait une percée fin novembre en s'intégrant au groupe Liberty Surf , une des sociétés de la galaxie Arnault, qui prenait une part majoritaire des actions. Dans cette première vague aussi, World Trading international(publication en ligne de catalogues d'objets publicitaires), Balease(exploitation de la couche SMS des téléphones mobiles), Kast Telecom(opérateur télécoms), ASK(carte de paiement de transport sans contact), VTDIM(spécialisé en veille technologique et veille concurrentielle par agents intelligents de nouvelle génération), etc...La grande vague d'automneEn trois mois pourtant, de fin août à début décembre 1999, la liste s'est encore bien allongée. Une vingtaine de start-ups ont fait irruption dans le paysage azuréen. Le dossier des 'Plus belles start-ups de la Côte', dossier qui continuera à s'étoffer, donne quelques exemples pris dans cette nouvelle génération d'entreprises. Parmi ces comètes, il est possible de citer Etexxà Nice, qui reprend le concept de 'marketplace' et l'applique à l'industrie textile, un domaine où les Européens sont très bien placés. Opt(e)way, qui a remporté le premier prix de l'innovation de la Telecom Valley, s'est installé sur un marché hyper porteur : celui de la cartographie pour les 'clients Internet légers' (type mobiles, PDA, informatique embarquée, etc.).A inscrire dans cette liste E-acute, qui a mis au point un nouveau système d'écriture pour les mobiles, Infobjectcréé par des chercheurs de l'INRIA et du Cermics, qui ont finalisé un logiciel permettant la fusion de bases de données d'origines différentes, Right Vision, fondée par d'anciens cadres de Cegetel qui va mettre sur le marché des 'appliances Internet' une boite magique simplifiant l'ensemble des utilisations Internet à l'usage des PME.Et puis, toujours sur ce créneau de la nouvelle vague des start-ups, Surf Designet son procédé de fidélisation des internautes, Techtonicpour le marketing sur Internet, WebTime Medias, société éditrice de Sophianet.com, pour les publications en ligne (elle a obtenu récemment le label innovation de la Telecom Valley), 7Wayspour les centres d'affaires virtuels, dBTech, qui propose des produits digitaux interactifs et multimédias pour les consommateurs du monde entier, Wimba, issue de l'Institut Eurecom, qui donne de la voix aux e-mails, Sekoyaqui met au point des logiciels de communication (type Outlook) très sophistiqués, etc.Le plus beau cadeau des trente ansLa liste est loin d'être exhaustive. D'autant moins que les écoles et les centres de recherche accélèrent le passage de la recherche à la création d'entreprise. L'INRIA, qui a déjà fourni quelques unes des plus belles start-ups de la Côte, en offre un exemple, Eurecom également (un des chercheurs de l'Institut doit d'ailleurs présenter mardi 7 décembre dans les locaux de la SAEM de Sophia Antipolis, un procédé de vidéo serveur révolutionnaire).Le mouvement est lancé. Il est appuyé par la DPCT (Direction des pôles de compétences technologiques), qui, relayée par le Ceram, a décidé de jouer à fond les start-ups et le nouvel entreprenariat. Pierre Laffitte lance un 'Club des start-ups' vendredi 10 décembre. Le père de la technopole appelait de ses vœux depuis des années, la création d'entreprises innovantes, les 'poules aux œufs d'or de l'économie. Le Conseil général, à travers le CICA (Centre international de communication avancée), pépinière d'entreprises, véritable berceau des start-ups sophipolitaines à succès, peut se targuer d'avoir 'couvé' quelques unes des futures grandes entreprises de la Côte.La greffe sophipolitaine (Sophia s'est bâti au départ grâce à l'implantation de grandes entreprises venant de l'extérieur) semble, cette fois, avoir véritablement bien pris. L'année 1999 restera comme celle d'une nouvelle croissance : la croissance endogène. C'est le plus beau cadeau d'anniversaire que la technopole pouvait rêver pour ses trente ans.