Nice-Matin : Robert Namias, le Pdg, claque la porte
Crise de gouvernance à Nice-Matin, le groupe régional repris en novembre dernier par ses salariés à travers une SCIC (Société coopérative d'intérêt collectif). Le Pdg, Robert Namias, ancien directeur de l'information de TF1, a annoncé mercredi matin qu'il quittait ses fonctions en raison de "l'ingérence" de salariés actionnaires qu'il jugeait "incompatible" avec sa mission.
Première crise de gouvernance à Nice-Matin depuis la reprise en novembre dernier du groupe par ses salariés à travers une SCIC (Société coopérative d'intérêt collectif). Dix mois après son arrivée aux commandes du quotidien régional, Robert Namias, 71 ans, briscard de l'information, s'en va. Nommé Pdg le 1er décembre 2014, l'ancien directeur de l'information de TF1 dont la présence avait crédibilisé le dossier de reprise des salariés, a annoncé ce matin à l'AFP qu'il avait décidé de quitter ses fonctions. Cela en raison, a-t-il précisé, de "l'ingérence" de salariés actionnaires qu'il jugeait "incompatible" avec sa fonction de président du directoire, l'organe exécutif chargé de la gouvernance.
Des comptes qui ne seraient pas aussi excellents que vantés par le Pdg
Ce "clash" couvait depuis le début de l'été alors que, côté salariés-actionnaires, certains reprochaient au Pdg de gouverner seul et de ne pas rendre compte. La crise s'est cependant déclenchée la semaine dernière alors que se profilait une réunion du Conseil de surveillance le 10 septembre, l'instance représentant les actionnaires (en l'occurrence les salariés) et à laquelle le directoire doit rendre compte. Le désaccord s'est cristallisé autour du bilan financier du groupe. Alors que Robert Namias annonçait qu'il était excellent, des doutes s'étaient faits jour sur la réalité de cette excellence. Le Conseil de surveillance avait donc insisté pour disposer des chiffres avant la réunion.
En fin de semaine dernière, Robert Namias avait quant à lui envoyé une lettre en recommandé au président du conseil de surveillance, Jean-François Roubaud, pour exprimer son désaccord sur le fonctionnement de la gouvernance. S'il ne parlait pas alors de démission, il laissait entendre qu'il ne souhaitait pas poursuivre sa mission dans ces conditions. D'où hier, mardi après-midi, une réunion informelle des membres du Conseil de surveillance pour tenter de clarifier la situation et prendre une position en vue de la réunion officielle du 10 septembre.
Il avait alors été décidé d'envoyer une lettre (par mail et par courrier) à Robert Namias pour préciser les conditions dans lesquelles il pourrait rester. Des conditions qui n'ont pas dû satisfaire ce dernier puisque ce matin, mercredi, il annonçait à l'AFP sa décision de partir. Personnalité du monde des médias, Robert Namias, dont le nom avait été avancé par Bernard Tapie pour diriger le groupe, restera comme celui qui a permis aux salariés de crédibiliser leur dossier de reprise et de l'emporter. A la tête du groupe, il a fait revenir les éditorialistes, entrepris de clarifier et simplifier la maquette, redonné une indépendance au journal.
Premier accroc en février avec le départ du président du Conseil de surveillance, Eric de Montgolfier
Il semblerait cependant que les comptes, s'ils ne sont pas catastrophiques, ne soient pas aussi bons que clamés avec une publicité qui rentre moins bien que prévu et certaines dépenses pas provisionnées. La crise de la presse est loin d'être terminée. C'était d'ailleurs autour de cette question financière que s'était joué en février dernier le départ d'Eric de Montgolfier.
L'ancien procureur de la République de Nice, qui avait été le premier président du Conseil de surveillance, avait alors évoqué des difficultés financières et s'était offusqué d'entendre parler de vente d'actifs immobiliers. Il avait alors déclaré dans les médias qu'il trouvait "curieux qu'ils en soient là", et avait insisté sur le fait qu'un Conseil de surveillance est chargé notamment de "contrôler le directeur général" et qu'il doit donc être "complètement informé de la situation". Le même débat qui sous-tend le clash d'aujourd'hui.
Les explications de "Nice-Matin"Actualisation 03/09/2015, 15h. Dans un article intitulé "Pourquoi Robert Namias quitte la tête du groupe Nice-Matin" publié jeudi 3 septembre, Nice-Matin donne son explication au départ de son Pdg. "Le conseil de surveillance regrette la décision de Robert Namias", est-il noté après avoir salué le "travail remarquable" qu'il avait effectué. "Toutefois, le fonctionnement en coopérative de l'entreprise implique le respect d'une culture de la transparence et du respect du fonctionnement statutaire." "Quand les salariés du groupe Nice-Matin ont racheté le journal, l'ambition était de pouvoir contribuer à la gestion stratégique et financière dans un dialogue de pairs à pairs avec la direction, comme dans toute coopérative. C'est dans cet esprit que nous avions proposé à Robert Namias de nous rejoindre. Dans l'intérêt du journal, le souhait de l'ensemble des équipes est que la transition s'opère dans la douceur. Une prochaine réunion du conseil de surveillance nommera la nouvelle gouvernance du groupe, qui aura notamment en charge de travailler sur un projet d'entreprise et une stratégie, et de déployer une nouvelle offre numérique particulièrement innovante d'ici à la fin 2015." |