L'animation telle qu'elle devrait se faire
Plus de dix ans d'expériences technopolitaines en France et dans d'autres pays européens nous permettent de présenter quelques conditions pour une mise en œuvre efficace de l'animation.S'appuyer sur des organismes existantsUne fonction d'animation technopolitaine n'est pas une fonction de développement technologique, ni une fonction de développement économique classique. Neutralité, réactivité, compétences en ingénierie de projet en sont les mots clés. Mais surtout, pour fonctionner, elle doit s'appuyer sur les organismes existants, c'est-à-dire, les regroupements d'entreprises, les organismes de valorisation, les expertises publiques et parapubliques, les expertises privées… ; elle ne saurait exister à part, au contraire, elle doit valoriser leurs compétences (lorsqu'elles sont reconnues) sur des projets dont elle suscite et accompagne la mise en œuvre. L'animation ne peut devenir un enjeu de pouvoir, puisqu'elle est par nature transversale ; elle ne peut être juge et partie. Sa reconnaissance dépend de sa réelle valeur ajoutée dans le système local dont elle est au service.L'animation est au service des entreprises auxquelles elle doit apporter une valeur ajoutée dans la mobilisation de leur environnement de compétences au profit de leurs projets de développement. L'animation doit commencer par comprendre de quoi ont besoin les entreprises qui pourrait réclamer une réponse mutualisée ou coopérative. Elle s'appuie sur une écoute et une compréhension fine de leurs besoins ; elle peut intervenir dans la germination des idées entre entreprises ou entre entreprises et laboratoires de recherche, ensuite, offrir des compétences d'accompagnement, soit à partir de ses compétences propres, soit, le plus souvent, en sollicitant les expertises existant dans son environnement.Donner des moyens aux clubs et associationsL'animation repose avant tout sur des relations interpersonnelles qui nécessitent d'établir des relations de confiance, lesquelles se nouent à partir de compétence reconnue et utile pour l'entreprise. Il s'agit de créer de la valeur dans les coopérations entre acteurs. A cet égard, tous les projets doivent être envisagés avec des retours sur investissements, des actions structurantes et des mises en réseau. Elle réclame à l'évidence des savoir-faire très spécifiques - il ne s'agit pas seulement de faire se rencontrer les entreprises - pour démultiplier le développement d'activités favorisées par la proximité spatiale - il s'agit de faire en sorte que '1+1=3'. Ces savoir-faire sont aujourd'hui absents sur Sophia.L'ingénierie de service est une composante de l'animation. Il s'agit d'offrir aux entreprises les services qu'elles demandent sur les plans administratifs, fiscaux, réglementaires… Si un guichet unique n'est pas nécessaire - cela ne marche nulle part -, la mise en réseau des services existant de manière à répondre aux demandes des entreprises, qu'elles qu'elles soient, est un réel atout pour un parc technologique. Par exemple, cela fait dix ans que Savoie Technolac met en œuvre une telle ingénierie.Ces quelques règles sont généralement appliquées dans la majorité des technopoles françaises et il est étonnant que la DPCT ne se soit pas informé sur la manière dont elles fonctionnent ailleurs.Enfin, si la (trop grande) diversité des clubs est un élément d'inertie du système sophipolitain, s'opposer à cette situation conduit à nier des phénomènes de réseaux qui font partie de l'histoire de Sophia. Ils permettent en effet de mobiliser rapidement les gens et s'il n'en sort actuellement rien de concret, c'est principalement en raison d'un manque de moyens et de méthodes. Il serait souhaitable d'accompagner l'évolution et la restructuration de ces réseaux de manière à profiter de leurs capacités relationnelles pour les mettre au service de la création d'activités. Ainsi, ces associations n'ont toujours pas de lieux de rencontres en commun et leurs moyens propres sont limités.Remobiliser sur un modèle de développement visionnaireD'une manière générale, il existe à Sophia une absence de prise de conscience collective de ce qu'est une technopole et des savoir-faire collectifs en fertilisation croisée, des compétences spécifiques que son animation requiert. Les responsables publics évaluent le développement de Sophia à l'aune de la création d'emplois, lesquels sont très positifs en 1998 et tout le monde doit s'en réjouir. Mais, ce critère est trompeur, car ces résultats sont davantage liés au développement mondial des nouvelles technologies de communication, et à la présence d'organismes comme l'ETSI, qu'à une contribution spécifique du parc à la création des activités qui portent ces emplois.C'est le système de production de l'innovation à Sophia qui est ici en cause. Il en découle une mauvaise perception de ce qui fait la force de Sophia, c'est-à-dire la qualité et l'autonomie des hommes, la variété de leurs compétences et la richesse de leurs réseaux internationaux.Par rapport à ce défi 'culturel' pour l'avenir de Sophia, les entreprises rencontrées demandent à ce que l'on arrête de poser le problème de l'animation en termes de structures, mais que l'on plutôt à mieux organiser les compétences existantes au profit des besoins exprimés ou non exprimés des entreprises. Elles souhaitent également, et peut-être surtout, que cette animation s'inscrive dans une dynamique de remobilisation globale au profit d'un modèle de développement à nouveau visionnaire.