Eric Marée, un manager international à la barre de Virbac
Diplôme HEC français et MBA américain, un parcours professionnel qui passe par MC Kinsey, Rhone-Poulenc Rorer et Roche, Eric Marée, président du Directoire de Virbac depuis plus de 8 ans, a bien le profil d'un manager international.
Président du Directoire de Virbac, à Carros, depuis un peu plus de 8 ans, il est celui qui a contribué à ancrer dans l'"establishment" des laboratoires internationaux, le laboratoire vétérinaire azuréen fondé par Pierre Richard Dick. Ce qui n'était pas une mince affaire. Dominique Perron Rousset, consacre le troisième de ses "entretiens privés", avec ce grand acteur de l'économie azuréenne qui, à travers l'association PACA Entreprendre, n'hésite pas à aider ceux qui font le pari de la création d'entreprise. Comme pour les deux autres entretiens de cette série, la fondatrice de Tara Communication, cabinet conseil en image et management spécialisé en communication financière, apporte une touche supplémentaire à ce portrait à travers son regard de spécialiste de l'image. Le dialogue engagé, le questionnaire de Proust auquel elle soumet ses interlocuteurs et ses propres observations, permettent de mieux dessiner leur environnement, de découvrir plus en profondeur leur personnalité et certaines de leurs intuitions, de voir ce qu'ils font ou ont fait pour améliorer leur image. Flash sur Eric Marée.
L’environnementIl pleut, le temps est triste et, après avoir pris mon badge d’accès, je me presse vers l’entrée du bâtiment de la direction de VIRBAC. Un grand contraste m’attend à l’intérieur, le hall monumental est très chaleureux. Couleur marron, pour les murs avec de grandes silhouettes claires d’animaux dessinés; volonté marquée de montrer que nous entrons dans le monde de nos amis familiers. Un beau bouquet orangé sur le comptoir de l’accueil met une note de gaieté. La salle d’attente des visiteurs est séparée du hall par un magnifique aquarium, le sol est en bois foncé et les fauteuils clubs, en cuir marron glacé, sont très confortables. L’assistante d’Eric MAREE vient me chercher et, à l’étage, Eric MAREE, très souriant, m’ouvre sa porte. Son vaste bureau est double, espace de travail et salle de réunion. Les meubles classiques en bois sombre sont entourés de plusieurs reproductions en hymne à notre région, un CEZANNE, deux MATISSE, deux CHAGALL et un DUFY.
L’image d’Eric MAREE et de son entrepriseAu sein de votre entreprise, comment pensez-vous être perçu ? C’est une question difficile. Quelqu’un de plutôt rigoureux, droit, d’assez transparent et qui ne raconte pas d’histoire. Je pense que les gens savent que j’ai du respect pour eux. En même temps, je pense avoir de l’empathie mais manquer un peu de chaleur, ne pas être assez ouvert. J’ai du mal à faire rêver. Comment êtes-vous vraiment ? Il n’y a pas de différence. Je suis totalement incapable d’être en décalage avec ce que je suis ou ce que je fais. Mon rôle est de faire en sorte que l’équipe dirigeante soit la plus performante possible. Je fais tout pour cela. En quoi pensez-vous avoir à vous améliorer ? Ce n’est pas évident. Je pense que ce qui est important c’est de respecter les gens et leur dire la vérité. En même temps, j’aimerais être capable d’arriver à susciter l’enthousiasme et faire rêver. Le fondateur de VIRBAC, Pierre Richard DICK possédait cette qualité. Nous y réfléchissons, dans les réunions, avec les cadres. Auprès de vos clients, comment pensez-vous que VIRBAC est perçu ? Nous avons des clients dans 26 pays. Ma réponse peut être, donc, très différente en fonction des pays et de notre degré d’ancienneté, dans ces pays. Si on prend la France qui représente 20% de notre CA, nous sommes perçus comme une société dédiée aux vétérinaires. Nos plus gros concurrents sont, le plus souvent, les filiales de grands groupes pharmaceutiques. Nous sommes perçus comme ayant une culture différente – proximité avec les vétérinaires - innovante - et, capables de prendre des initiatives. Et vous, comment vous perçoivent-ils, à votre avis ? Les clients, je ne les vois pas tous les jours même si je m’efforce d’aller, régulièrement, sur le terrain. Nous n’avons pas quelques grands clients mais au contraire de nombreux clients individuels. Bien que je ne sois pas vétérinaire, je pense que nous avons réussi à développer la société, ces dernières années, en essayant de servir au mieux nos clients. L’accent a toujours été mis sur la proximité vétérinaire. Vous travaillez, avec de nombreux fournisseurs, quelle relation entretenez-vous avec eux ? Nous avons des fournisseurs dans des secteurs extrêmement différents (plastic, carton, matières premières, molécules…). Je pense que nous sommes perçus comme représentant une société dure en négociation, exigeante, qui demande de la qualité et des prix compétitifs. En même temps, nous sommes capables de nouer des relations de partenariat. Ne pas uniquement agir en fonction du court terme et éliminer un fournisseur parce qu’il n’a pas été capable de baisser son prix. Lui laisser le temps d’investir et même si cela nous coûte un peu cher pendant 6 mois, nous savons que nous serons satisfaits, à terme. Auprès de vos pairs. Quelle image, les personnes à l’extérieur de votre entreprise ont-elles de vous, à votre avis ? Je ne sais pas trop. L’image du dirigeant, à mon avis est en partie dépendante des résultats de la société qu’il dirige. Je pense que je suis perçu comme quelqu’un qui n’est pas dans l’entreprise depuis très longtemps, 8 ans et demi. Je considère que mon rôle principal est au sein de l’entreprise et je suis, par conséquent, sélectif dans mes actions à l’extérieur. De toutes les façons, je suis incapable de gérer trop de choses en même temps. D’ailleurs, je ne suis pas persuadé que les actionnaires apprécieraient ( rires ..). J’ai été assez actif dans le projet d’« Initiative Riviera Technologies » durant ses 3 années d’existence. Mettre en avant le potentiel de la région, le maintenir et le développer reste une excellente idée. Vous êtes le président de l’association PACA ENTREPRENDRE, depuis un an et demi, pourquoi cet engagement ? C’est une belle mission car notre pays a besoin d’entrepreneurs qui développent. Cela reste un terrible parcours du combattant (lourdeurs sur les plans administratifs et financiers). Nous rencontrons des personnes qui ont vraiment de la qualité, des idées, du courage et nous essayons de les aider à développer leurs entreprises, En tant que président, je passe du temps à faire fonctionner l’association et ne vois, avec regret, que quelques dossiers. Je participe, néanmoins, à certains comités d’engagement.
Parcours de l’entrepriseVIRBAC a été cotée en 1985. Que vous a apporté cette introduction en bourse et quelles en ont été les conséquences ? A l’époque, le fondateur a décidé de financer son développement et de rendre liquide ses actifs. Aujourd’hui, nous n’utilisons pas beaucoup la bourse (appel de capitaux) car la famille du fondateur ne désire pas être diluée. Par ailleurs, la société s’est bien développée et génère un cash flow assez important capable de financer notre développement interne et nos acquisitions. Quant à l’endettement, ponctuel, il est assez faible. Les sociétés cotées pures, peuvent tomber dans des dérives sur la pression du court terme. Les société familiales peuvent tomber dans d’autres dérives : erreurs stratégiques, égotiques, ne pas être dans la logique optimum de marché, ne pas prendre les décisions qui s’imposent ou ne pas mettre en face les gens compétents. Quand vous êtes coté, ce n’est plus possible. Cette excellente combinaison peut apporter, d’une part la continuité stratégique et la vision long terme d’un actionnariat familial et, d’autre part de la rationalité avec un certain souci de la performance du à la bourse. Virbac a créé une fondation, pourquoi ce choix ? C’est une fondation qui existe depuis assez longtemps, elle avait, à l’époque des visées plutôt scientifiques. Elle est, désormais, une fondation qui cherche à faire progresser, chez les enfants, la perception de l’animal. Un enfant qui sait bien s’occuper d’un animal, c’est quelqu’un qui sait comprendre le respect d’autrui et c’est donc l’aider à se socialiser. L’association aujourd’hui est en sommeil, car le leader de cette action est Jean-Pierre DICK, fils du fondateur : Jean-Pierre DICK est un marin professionnel occupé à 150 %, c’est maintenant l’un des meilleurs sur les circuits. L’idée reste juste et nous y reviendrons lorsqu’il sera plus disponible. L’engagement depuis 5 ans auprès de Jean-Pierre DICK, que cela vous a-t-il apporté ? Cela nous a apporté beaucoup de choses, à la fois en interne et en externe. En interne, toute l’entreprise est mobilisée derrière lui. C’est à la fois passionnant pour la performance qu’il obtient, par le coté exemplaire et, aussi, pour l’illustration des valeurs d’entreprise. En externe, globalement cela nous fait connaître, de façon très importante. En effet, de nombreux clients viennent au départ et aux arrivées des courses. Jean-Pierre étant lui même vétérinaire, c’est une véritable projection des personnes qui s’identifient, complètement, à son projet.
La question d’actualitéLe dollar est actuellement très bas par rapport à l’euro (1,56 €), 78% de vos ventes sont réalisées hors de France, cela a-t-il un impact important pour VIRBAC et dans quelle mesure ? Je formulerais plutôt que l’euro est très haut et cher par rapport aux autres monnaies. Nous produisons dans la monnaie du pays. Néanmoins, malgré cela nous sommes parfois impactés par rapport à la monnaie. Par exemple, ce que nous vendons en Angleterre est produit à Carros. La livre a décroché de 10 points, par rapport à l’euro. Donc, les résultats que nous faisons dans ce pays en euros représentent moins. Hors change, nous progressons de façon importante mais ramené en euros cela peut être zéro, voire même négatif. Parfois, nous avons l’impression de courir avec un sac de cailloux dans le dos. C’est comme cela que s’entraînent les champions mais, par moment, nous aimerions bien poser le sac (rires). |