Elles ont fait polémique sur la Côte cet été, les croisières, face à ces “villes flottantes”, ces bateaux de plus en plus gros qui investissent la rade de Villefranche-sur mer ou viennent mouiller face à la Croisette de Cannes. On se souvient encore des images de Christian Estrosi, le président de la Métropole, à l’abordage d’un gros paquebot, venant lui signifier qu’il n’était pas le bienvenu. Pour lutter contre le sur-tourisme et les nuisances environnementales alimentés par ces méga porteurs, Nice et Cannes, avaient tenté d’établir leurs propres règles. Suspendues ou limitées par la justice administrative, ces initiatives locales ont accéléré la mise en place d’un dispositif harmonisé et concerté à l’échelle départementale. (Photo WTM : un paquebot XXL au mouillage en baie de Cannes).
C’est ce qu’apporte un arrêté inter préfectoral signé en début de semaine par le préfet des Alpes-Maritimes Laurent Hottiaux et le préfet maritime de la Méditerranée, le vice-amiral d’escadre Christophe Lucas. Cet arrêté inédit, entré en vigueur dès mardi 9 décembre, porte sur la régulation de l’accueil des navires de croisière et de leurs passagers dans les Alpes-Maritimes et concerne donc principalement la rade de Villefranche et la baie de Cannes. Une première en France avec la mise en forme d’un cadre clair et équilibré permettant de conjuguer attractivité économique et responsabilité environnementale.
Ce nouvel arrêté fixe ainsi des seuils précis sur le nombre de passagers et sur la taille des navires pouvant accoster dans les ports azuréens ou mouiller au large. Désormais, les escales devront respecter une moyenne annuelle de 2.000 passagers débarqués par jour, avec une limite exceptionnelle fixée à 3.000 passagers maximum pour une même journée. Les grands navires transportant plus de 1.300 passagers ne pourront être accueillis qu’un par jour et par zone de mouillage, et leur nombre sera plafonné à 15 par mois en juillet et août — une mesure pensée pour soulager les pics estivaux de fréquentation.
Cette régulation s’inscrit également dans une dynamique environnementale renforcée. Les compagnies signataires de la Charte croisière durable en Méditerranée, adoptée en juin par la France et Monaco, bénéficieront d’une priorité dans l’attribution des autorisations d’escale. Cette charte engage les opérateurs sur 20 critères liés à la réduction des nuisances marines et atmosphériques, à la protection des cétacés, à la limitation des pollutions lumineuses et sonores, ainsi qu’à la sensibilisation des passagers. L’arrêté prévoit aussi des mesures d’intervention en cas d’épisodes de pollution ou de détection de grands mammifères marins.
Avec ce texte, l’État affirme sa volonté d’adapter le modèle touristique azuréen aux enjeux contemporains : transition écologique, sobriété énergétique, qualité de l’air et préservation du littoral. Une instruction préfectorale viendra préciser prochainement les modalités pratiques de mise en œuvre. Le traité de paix dans la guerre aux villes flottantes ?