CEMEF de Sophia : le super isolant thermique dont rêvent le bâtiment…et l'environnement!
Nos déchets alimentaires au secours de la transition énergétique ? C'est la perspective qu'offrent les bio-aérogels développés par l'équipe de Tatiana Budtova au CEMEF (Centre de Mise en Forme des Matériaux), recherches distinguées par le Prix ADEME 2014 des Techniques Innovantes pour l’Environnement. Solides, ultra-légers, supers isolants thermique et bio-sourcés, ils pourraient répondre aux besoins d'isolation des maisons anciennes.
Nos déchets alimentaires vont-ils servir à la production d'une nouvelle génération de matériaux super-isolants thermiques? C'est l'une des perspectives qui est ouverte par les travaux de recherche sur les bio-aérogels de Tatiana Budtova, enseignant-chercheur au CEMEF MINES ParisTech, travaux qui viennent d'être mis à l’honneur avec le Prix ADEME 2014 des Techniques Innovantes pour l’Environnement, dans la catégorie Matériaux. En constituant la matière première de ces matériaux super-isolants thermiques que sont les aérogels, les déchets alimentaires ainsi valorisés viendraient répondre aux besoins actuels d'isolation des maisons anciennes.
Tatiana Budtova (à droite) lors de la remise du prix de l'ADEME
Un matériau magique utilisé dans la conquête de l'espace
Ce bio-aérogel un peu magique qu'a primé l'ADEME s'appelle l’Aéropectine. C'est un aérogel d’origine naturelle créé au CEMEF, Centre de Mise en Forme des Matériaux à Sophia Antipolis. Petite explication technique : cette Aéropectine est produite à base de pectine, un polysaccharide (sucre complexe), très courant dans les végétaux, les pépins et les zestes de fruits. Développé par le laboratoire sophipolitain, c'est le premier aérogel 100% bio-sourcé, monolithique et super-isolant thermique.
Pour mieux saisir l'intérêt des recherches menées par Tatiana Budtova, qui dirige depuis 2009 la chaire Bioplastiques ouverte au CEMEF de la technopole, il faut savoir que l'aérogel est un matériau fantastique. C'est un solide à très faible densité (il est composé jusqu'à 99,8% d'air) qui possède plusieurs propriétés remarquables, dont sa capacité à isoler thermiquement. En plus de cette qualité exceptionnelle en termes d'isolation, il dispose de propriétés mécaniques importantes : il ne se fritte pas, ne casse pas en compression et ne fait pas de poussières quand on le découpe. Presque complètement transparent, il fait penser au toucher à du polystyrène, est-il noté dans Wikipedia.
Il a été découvert dans les années 30. Mais les premières productions industrielles de plaques d'aérogel n'ont été lancées qu'au début des années 2000. Leurs coûts restent pour l'instant prohibitifs et il ne sont utilisés que dans des cas spécifiques comme le spatial pour la combinaison des astronautes ou la protection contre la chaleur des robots explorateurs de mars.
Le premier aérogel 100% bio-sourcé
"La nouveauté que nous avons introduite, c'est qu'il s'agit d'aérogel bio-sourcé, commente Tatiana Budtova. Les premiers aérogel avaient été fabriqués à base de silice. Nous avons également, de notre côté, travaillé avec la cellulose. L'aérogel est un matériau magique : il est solide, mais plein d'air avec une conduction thermique qui est plus basse que la somme de ses deux composants. L'effet de sa nanostructure. Sous la forme de plaque, il peut servir à l'isolation d'habitation ancienne avec, pour le même coefficient de protection, une épaisseur de trois à cinq fois moindre que les isolants actuels."
"Le fait d'être bio-sourcé, lui donne aussi un autre avantage : il est biodégradable et n'est pas toxique. Il peut être utilisé par exemple dans l'industrie pharmaceutique et bio-médicale et servir de matrice pour la prolifération de cellules vivantes ou pour la libération contrôlée de médicaments (la coque des médicaments que l'on avale). Il ouvre aussi la porte à un nouveau secteur de production : la valorisation des déchets agroalimentaires pour la fabrication d’un matériau écologique."
Bien sûr, il s'agit encore de recherche fondamentale et nous n'en sommes pas à une production industrielle de masse. Mais un chemin a été ouvert. A noter que les résultats obtenus sur l’aéropectine sont issus du projet ANR "Nanocel" et du projet européen "Aerocoins". Ils proviennent des travaux de Tatiana Budtova et de ses doctorants, Cyrielle Rudaz et Arnaud Demilecamps, en collaboration avec le Centre PERSEE MINES ParisTech. Autant de recherches qui continuent pour améliorer les propriétés de l’Aéropectine et développer d’autres bio-aérogels.
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Cyrielle Rudaz et Arnaud Demilecamps, les deux doctorants du CEMEF qui ont participé aux travaux de recherche sur les aérogels