Antibes : sculptures pour flaneur solitaire
Pendant tout l'été, la biennale 'Sculptures sous le soleil d'Antibes', va transfigurer la promenade du Fort Carré au port Vauban et le décor de l'Opéra Naval.
Ils sont une quarantaine d'artistes sélectionnés parmi cent cinquante candidatures, français, québécois, italiens dont le dénominateur commun est le vent de création qui souffle sur l'ensemble des oeuvres exposées et le choc visuel qu'elles procurent. Nul doute que la flânerie qui s'impose le long du port ne réserve quelques surprises aux promeneurs dont les repères artistiques se sont figés sur Picasso pour la peinture et sur Rodin pour la sculpture. Ici, pas de thématique imposée. La liberté de l'artiste n'a d'autres limites que celles imposées par son imagination.Les quarante sculptures exposées au regard des passants sont autant de routes tracées pour aboutir au terme d'une aventure qui résumerait le XXe siècle tout en préfigurant le 21ème. Quarante directions pour aborder, comme l'écrit dans sa présentation de la 4e biennale, Dane Mcdowel 'l'abstraction, la figuration, le néoprimitivisme, l'art conceptuel, le pop art, le néoréalisme'. Le visiteur enthousiaste ou sceptique n'a pas à choisir mais plutôt à se laisser porter par une dynamique de diversités , reflet de nos sociétés émiettées, aux facettes de Janus, le dieu qui ouvre ou ferme les portes de nos imaginaires.Objectif pédagogiqueCette exposition de sculptures dans la rue devient prétexte à faire entrer l'art dans les établissements scolaires. Sept établissements de la ville sont concernés : Lycée du Génie Civil, collèges Fersen et Saint Philippe, écoles Guynemer, Prévert, Jean Moulin et même une école maternelle. Si cette sensibilisation des étudiants et écoliers s'avère concluante, l'expérience sera étendue à d'autres établissements de la ville.Choix parmi les œuvresIl n'est pas possible de donner ici dans le détail une description de toutes les oeuvres retenues par le jury. Notre choix de trois est forcément partial et partiel. Il n'est qu'une invite à ce tour complet du port pour se projeter au-delà d'une ligne d'horizon perceptible derrière la poésie des mats et des structures, symboles d'un rêve aussi vieux que l'humanité.La voile de Marcovilleavec son matériau de verre rigide coupé en milliers de lamelles, assemblées plutôt que sculptées, colorées avec l'aspect du métal et pour faire plus vrai de métal rouillé. Ce paradoxe comme l'appelle Carole Andréani, qui requiert un véritable art du maquillage du matériau, entretient une illusion sur fond de voiles, elles, prêtes à appareiller.La mélodie du bord de mer de Nicolas Chenardmérite qu'on lève les yeux en marchant le long du quai Henri Rambaud. Des fils tendus où sont fixées des flèches oscillent à tout vent. Ajoutons y le son de ces balancements aériens et l'on obtient ce que l'auteur appelle une écriture improvisée de ce qu'il entend. Cet assemblage ingénieux de simplicité , en osmose parfaite avec son environnement n'est pas une frontière entre la mer et la terre mais plutôt un lien entre les éléments pour nous rappeler leur ' invisible psalmodie '.La mer qu'on voit danser de Jean-Claude Laportesurgit de l'eau au rond-point à la Fontaine, dans une féerie cinétique du monde sous-marin, un monde qui a hanté l'enfance du sculpteur. À chaque plongée, son imaginaire s'enrichit de nouvelles créatures aperçues au fond et dont il traduit la réalité mouvante et changeante que connaissent bien les explorateurs du monde sous-marin. Les poissons prennent l'allure de cerfs-volants de toutes les couleurs tandis que la flore dessine des arabesques à jamais mobiles sous ou à la surface d'une eau pure sur fond de geysers comme pour régler un ballet sans fin qui n'appartiendrait qu'à lui.Ce choix serait totalement arbitraire si le public comme d'ailleurs les scolaires n'avaient la faculté de donner leur avis en émettant un vote dont les bulletins et les urnes sont disponibles en différents points de la ville. Il est vivement recommandé de ne pas s'abstenir.